jeudi 23 juin 2011

Pécresse réforme la licence en profondeur

Le Figaro, 22 juin 2011

Après avoir donné leur autonomie aux universités, Valérie Pécresse s'attaque à l'avenir du premier des diplômes universitaires : la licence. Après six mois de négociations avec les principaux acteurs du monde universitaire et de l'entreprise, la ministre de l'Enseignement supérieur et de le recherche vient carrément de finaliser un diplôme qu'elle veut «nouveau» : plus professionnel, plus tourné vers l'emploi, plus qualifiant et surtout revalorisé. Elle ne veut pas perdre du temps : la licence nouvelle version verra donc le jour à la rentrée 2012.

A la clé, trois objectifs : une exigence académique de haut niveau. La licence doit devenir selon la ministre «un diplôme de référence» et permettre une meilleure insertion professionnelle en favorisant les stages en entreprises.

Chaque étudiant devra se voir proposer un stage pour «doper» son cursus. Le but étant à la fois de permettre à ceux qui ne souhaitent pas poursuivre leurs études à l'issue du premier niveau de diplôme universitaire d'avoir accumulé un début d'expérience professionnelle et d'être aussi crédibles lors de leurs premiers pas sur le marché de l'emploi que leurs homologues issus d'écoles de commerce et d'ingénieurs.

«Nous voulons aussi personnaliser les parcours, permettre à ceux qui le souhaitent de changer de filières ou d'université en fonction de leurs compétences, de leurs projets et de leurs résultats», dit-on au cabinet de la ministre. Enfin, la ministre veut prévenir le décrochage universitaire, qui concerne encore 80 000 étudiants chaque année.

«Nous ne partons pas de rien, insiste-t-elle. La dynamique est engagée depuis trois ans, nous avons replacé la pédagogie au coeur des préoccupations de l'université. Notre ambition c'est désormais de généraliser les dispositifs les plus aboutis.» En 2011, quelque 211 millions d'euros ont effectivement été investis dans le plan réussir en licence.

Premier axe pour parvenir à ses fins : Valérie Pécresse va commencer par augmenter le nombre d'heure de cours. Elles seront désormais fixées à un minimum de 1500 heures, pour se rapprocher du modèle des classes préparatoires qui dispensent elles 900 heures par an, soit 1800 sur les deux ans de prépa à leurs étudiants.

S'il atteint déjà 1 745 heures sur les 6 semestres de la licence en «Sciences, technologie, santé» ou en «STAPS», le volume horaire pour une licence n'est que de 1 548 heures en «Droit, économie, gestion», 1432 heures en «Arts, lettres et langues» et «Sciences humaines et sociales» contre 1270 heures avant 2002. Dans certaines disciplines, en fonction des options choisies, le volume horaire minimum est de 1200 heures.

Fini donc en 2012 les emplois du temps parfois jugés bien légers par les parents, qualifiés de «gruyère» par les étudiants. Même s'ils laissent en contrepartie plus de place pour le travail personnel, les recherches documentaires, la lecture et… la douceur de vivre.

C'est bien contre cette image connotée de dilettantisme et perçue comme négative par les employeurs que la ministre engage son offensive. Pas de raison que seuls les diplômés de grandes écoles empruntent des voies royales.

Deuxième axe d'évolution, une généralisation des dispositifs mis en place dans certaines universités de personnalisation des parcours, avec du soutien, des possibilités de réorientation, des itinéraires pour changer de voie en cours d'année universitaire pour éviter de perdre trop de temps.

Mais il s'agit également de développer les dispositifs dits d'excellence (cycles préparatoires, doubles licences, parcours renforcés) qui doivent bénéficier, via l'établissement de passerelles, à l'ensemble des étudiants accueillis à l'université.

Enfin, cette nouvelle licence va comporter un important volet de meilleure préparation à la vie professionnelle avec des stages prévus tout au long des cursus. Une faiblesse du monde universitaire par rapport à celui des grandes écoles ou des IUT.

En effet, seuls 11 % des étudiants de licence font actuellement un stage, essentiellement en troisième année. Seuls 2 % des premières années ont eu une telle expérience, 9 % des deuxième année et 27 % des troisième année.

Une faiblesse aux yeux des chefs d'entreprises quand on sait que les élèves de grandes écoles qui ont jusqu'ici leur préférence effectuent eux des stages nombreux voire des années de césure pour doper leur CV avant de tenter de décrocher leur premier emploi.