jeudi 4 février 2010

Valérie Pécresse: «Ne pas faire de procès»

Par VÉRONIQUE SOULÉ

Valérie Pécresse défend un système complémentaire avec des passerelles entre université et grandes écoles.

La ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Pécresse, défend l’idée de nouveaux liens entre université et grandes écoles.

Le système dual français ne vous paraît-il pas dépassé ?

Non. L’idée de la réforme est justement de remettre l’université au cœur de l’enseignement supérieur avec, notamment, le doctorat qui devient le diplôme phare.

Nous voulons bâtir un système autour d’universités fortes qui, grâce à la loi LRU [sur l’autonomie des universités], ont une autonomie pédagogique et de gestion, et qui concluent des alliances avec des écoles. On aura ainsi des universités fédérales [les PRES, pôles de recherche et d’enseignement supérieur]. Mais il n’y a pas l’un qui gagne contre l’autre.

On encourage les passerelles : les universités ouvrent des classes préparatoires aux grandes écoles, on peut venir d’une école puis passer à l’université ou l’inverse.

Je veux un enseignement supérieur de ponts et de portes ouvertes, et non plus d’impasses et de culs-de-sac, afin qu’à 17 ans tout ne soit pas joué, que lorsqu’on n’a pas le bac on puisse aller à l’université, et que si l’on échoue en première année, on puisse rebondir ailleurs.

L’université doit accueillir tous les bacheliers alors que les grandes écoles sélectionnent les meilleurs : le jeu n’est-il pas inégal ?

C’est une fausse question, une idée reçue. L’université aussi sélectionne. Les IUT [Instituts universitaires de technologie] sélectionnent. Il y a la sélection par l’échec à la fin de la première année. Il n’y a qu’à regarder aussi la première année de médecine où il y a 80 % d’échec. Les différences sont ailleurs, comme dans la qualité de la recherche, meilleure en université, ou dans la professionnalisation, plus avancée dans les écoles.

Le problème est qu’on a demandé à l’université de porter la charge de la massification sans lui en donner les moyens et sans réfléchir à de nouvelles missions. Mais nous avons accordé 20 % de moyens de fonctionnement en plus en moyenne aux universités, et nous avons lancé le plan Campus, un programme ambitieux pour rénover l’immobilier.

Mais les grandes écoles n’assument plus leur rôle d’ascenseur social…

Elles ont tout de même fait des efforts considérables, notamment avec les «cordées de la réussite», un réseau où les élèves des écoles et les étudiants d’universités aident les lycéens d’établissements défavorisés proches. Autre exemple, les écoles d’ingénieurs qui ont en moyenne 26 % de boursiers. Le fait d’avoir atteint les 30 % dans les classes prépas va avoir un effet en chaîne. Il ne faut donc pas faire le procès des grandes écoles : le taux de boursiers en deuxième année de médecine ou en master universitaire ne dépasse sans doute pas celui des grandes écoles. L’université doit aussi faire fonctionner l’ascenseur social.